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Maison de retraite au Maroc : Vieillesse dorée

« Groupe de gestion de maisons de retraite médicalisées en France cherche investisseur pour se développer au Maroc ». « Quoi de mieux pour les vieux jours que de vivre au soleil, avec une équipe et un suivi médical ? ». Il suffit de taper sur un moteur de recherche « maison de retraite Maroc » pour tomber sur plusieurs offres et demandes de ce genre.

Encore une autre : « Possédons terrain propice pour création de maison de retraite médicalisée au Maroc pour personnes âgées françaises ou européennes. Cherchons capitaux et partenaires dans le domaine ».

Voilà bien dix ans que des Européens, et en particulier des Français, affluent au Maroc pour s’y installer. Il y a la mode des riads et des maisons dans la Palmeraie de Marrakech, réservée aux personnes aisées.

Il y a également les retraités européens « très classe moyenne » qui posent par centaines leur camping-car près d’Agadir pour un hiver au soleil. Mais aussi ceux qui achètent une résidence au Maroc pour passer leur retraite. Outre le soleil, le faible coût de la vie par rapport à l’Europe ou les employés de maison peu chers, les avantages fiscaux sont considérables. Mais une nouvelle étape est franchie avec les maisons de retraite. Plusieurs promoteurs ont commencé à faire des démarches pour en ouvrir depuis deux ans environ à Marrakech, a indiqué une source locale qui a requis l’anonymat. Deux ou trois projets français seraient en cours d’étude.

Quelques personnes auraient également frappé à la porte de consulats à Marrakech pour savoir si des maisons de retraite européennes étaient déjà installées dans la région, afin de s’y inscrire ou d’y placer un proche. Si, pour le moment, aucun projet n’a abouti, cela ne devrait pas tarder. D’autant que la wilaya et la mairie encouragent les investisseurs. Il y aurait des facilités pour investir dans ce genre de projets. Et cela se comprend aisément. L’installation de maisons de retraite devrait être créatrice de richesses. Il faudra des femmes de ménage, des infirmières mais aussi des personnes qualifiées pour tenir l’administration de la maison de retraite. Il faudra encore du personnel dans les cuisines pour faire à manger aux pensionnaires. Cela devrait dynamiser l’économie locale... Et puis, quand les proches viendront, ils en profiteront pour faire du tourisme, quelques emplettes ici et là. De leur côté, les retraités européens auraient largement à y gagner. En France, une maison de retraite coûte environ 2.000 euros par mois. Une charge élevée pour la classe moyenne.

Au Maroc, ce sera très certainement beaucoup moins cher, ne serait-ce qu’à cause du faible coût salarial. Et puis, il y aura le soleil, si bon pour le moral, tout en restant à proximité de l’Europe. Les Français n’auront pas à faire d’effort pour apprendre une nouvelle langue. Le paradis pour la retraite à moindre coût !

Difficile adaptation ?

Françoise Piétri, responsable de l’unique maison de retraite pour Français au Maroc, reste méfiante. La maison dont elle est responsable est installée depuis 1930 dans la capitale. Elle accueille des Français qui ont passé une grande partie de leur vie au Maroc. Beaucoup sont arrivés dans les années 50 ; certains y sont même nés. Ils sont souvent plus attachés au Maroc qu’à la France. Beaucoup parlent arabe. Ils achèvent leur vie paisiblement, dans une grande maison entourée d’un joli parc, qui peut accueillir jusqu’à 42 pensionnaires. Ils payent entre 5.600 dirhams et 8.000 dirhams par mois. Cette maison de retraite n’a pas grand-chose à voir avec celles qui devraient ouvrir. Mme Piétri s’interroge d’ailleurs sur les nouveaux projets. « Les services ne sont pas structurés de la même manière entre la France et le Maroc », affirme-t-elle. Les soins sont différents. « Les cultures sont différentes, contrairement à ce que les Français peuvent penser dans un premier temps », souligne-t-elle. « Ce ne sera pas facile pour des Français qui débarquent de France à l’âge de la retraite de s’adapter au Maroc »", dit-elle. En poste depuis six mois, Mme Piétri a déjà vu défiler quatre consultants qui envisagent d’ouvrir des villages de retraités. Ils voulaient savoir s’il était facile d’ouvrir une maison de retraite au Maroc. Facile, peut-être, puisque les autorités locales les soutiendront. Mais beaucoup de Marocains restent farouchement remontés contre les maisons de retraite, perçues comme des mouroirs.

« Au Maroc, la priorité, c’est d’abord Allah puis après les parents. Pas question de les enfermer dans ce genre de maison », écrit une internaute sur un forum. Plusieurs autres approuvent. « Hassan II avait raison », écrit un autre, en référence au fameux discours de la fin des années 80 sur l’éclatement de la cellule familiale. « Le jour où l’on va ouvrir la première maison de retraite au Maroc, notre société sera en voie de disparition », avait déclaré le roi. Mais les choses semblent être en train de changer, au moins dans les familles aisées. « Des Marocains sont déjà venus me voir pour me demander s’ils pouvaient placer un parent dans la maison de retraite », assure Mme Piétri. Des Marocains qui vivent à l’étranger « aimeraient vraiment que leurs parents soient encadrés dans des maisons spécialisées ».

De même, des responsables de la Santé « commencent à se poser des questions sur les conditions de vie au sein de la famille ». Certains pensent que des maisons de retraite pour Marocains ouvriront d’ici une quinzaine d’années. Après les pays européens, c’est au Maroc de gérer le vieillissement de sa population. En 2014, 9% de la population marocaine aura plus de 60 ans alors que ce taux était de 5% en 1989. Dans de telles conditions, les maisons de retraite européennes pourraient inspirer des Marocains.

« Le jour où l’on va ouvrir la première maison de retraite au Maroc, notre société sera en voie de disparition ».


Source : Caroline Taix - Le Journal hebdo

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