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Aide aux aidants : résultats d’une enquête de l’UCP et perspectives

Avec le vieillissement de la population et le coût important du placement en institution, le rôle des aidants de proximité devient crucial. Dans ce contexte, une journée d'étude organisée par l'Union Chrétienne des Pensionnés (UCP) mouvement social des aînés (Belgique), a présenté les résultats d'une enquête identifiant les besoins des aidants proches ainsi que les réponses à apporter. Plusieurs associations se sont regroupées au sein d'une plate-forme afin de mieux cerner leur réalité et de proposer une aide adéquate qui ne concerne pas que les personnes âgées, mais aussi les personnes touchées par la maladie, l'accident ou le handicap. Détails.

Par Charlotte Royen, UCP mouvement social des aînés asbl et Bernard Van Tichelen, Mutualité chrétienne

Qui sont les aidants proches ?

Ce sont celles et ceux qui apportent leur aide au moins une fois par semaine, en dehors de leur profession, à une ou des personne(s) à l'autonomie limitée de leur famille ou de leur entourage, à domicile ou en maison de repos.

Agés en moyenne de 58 ans, ils représentent la « génération sandwich », devant se partager entre les parents, les enfants et petits-enfants.

Près des deux tiers (65%) sont des femmes et plus d'un tiers (36,5%) exerce encore aujourd'hui leur profession contre 55% au début de l'aide. 44% d'entre eux sont à l'heure actuelle pré-pensionnés ou pensionnés contre 25% au début de l'aide.

Comment ça démarre ?

L'aide se met en route suite au décès de l'un des conjoints, à une maladie, à un handicap ou encore à l'hospitalisation d'une personne. Mais cette personne n'est évidemment pas sentimentalement étrangère à l'aidant. En effet, 65% des aidants apportent leur aide dans le cadre du cercle familial. Cependant, qu'il soit familial ou non, le lien qui unit l'aidant et la personne en perte d'autonomie est, dans tous les cas, très fort. Certains aidants parlent même de l'aide comme d'un acte d'amour envers la personne en perte d'autonomie.

« En effet, s'interrogent les auteurs de cette étude, comment serait-il possible de surmonter toutes les difficultés inhérentes à l'aide pour une personne qui n'est pas chère à l'aidant ? ».

D'une manière générale, l'aide évolue au fil du temps et au rythme de la maladie ou du handicap de la personne aidée. D'une visite occasionnelle, les aidants passent vite à des visites régulières pour apporter les repas, les courses, les médicaments, etc. Évoluant d'une aide morale et légère à une aide physique plus lourde, les aidants n'ont souvent pas pu « prendre la mesure » de ce qui les attendait et peuvent se sentir « piégés ».

L'aide volontaire cohabite souvent avec l'aide professionnelle : médecin généraliste, infirmière, kinésithérapeute, aide familiale, garde à domicile, aide ménagère, service de repas à domicile, etc. sont une présence et un soutien fondamental à domicile. Alors qu'initialement, cette aide professionnelle est destinée à la personne en perte d'autonomie, elle joue également un rôle primordial pour l'aidant. En dispensant des informations, en assurant une présence, en prodiguant des soins … les aidants professionnels soulagent le travail de l'aidant bénévole. Ils peuvent être par ailleurs un soutien moral à l'aidant proche mais aussi un moyen de le rassurer quant au bien-être et au confort de la personne aidée.

Les répercussions de l'aide

Sur le plan professionnel d'abord, 13% des aidants sondés réduisent leur temps de travail, d'autres, au contraire, souhaitent travailler davantage afin de faire appel à des services professionnels et ainsi de garantir une qualité de vie à la personne aidée.

L'aide peut également avoir un impact sur le revenu mais très variable selon les cas : cela va du coût des déplacements pour rejoindre la personne aidée au paiement des services ou soins professionnels à domicile. Un tiers (32%) des aidants sondés par questionnaire n'a qu'un revenu net mensuel se situant entre 750 et 1500 euros pour l'ensemble de leur ménage. De plus, si le lien est matrimonial, cet impact est considérable. Pour ces aidants, il y a souvent une réduction du « train de vie » du couple mais aussi des activités qui s'organisent en fonction de la maladie ou du handicap. Le coût de la maladie (en terme de visites médicales, de médicaments, etc.) pèse alors fortement sur les revenus du couple.

S'ajoutent aussi des difficultés physiques et psychologiques. Pour 60% des aidants sondés, l'aide peut sembler difficile à supporter physiquement. Cette fatigue physique s'accompagne d'une fatigue morale et renforce cette dernière. L'aide apportée laisse 31% des aidants fatigués ou très fatigués. Outre la difficulté physique, la plupart des aidants reconnaissent négliger leur vie sociale, culturelle et familiale. Ainsi, ne pas s'oublier peut relever du défi pour l'aidant.

Par ailleurs, presque la moitié (46%) des aidants sondés admettent que l'aide est parfois difficile à vivre sur le plan psychologique. Au total, ils sont 68% à rencontrer des difficultés de ce point de vue. Les témoignages récoltés en entretien collectif mettent particulièrement en avant la détresse psychologique que vivent bon nombre de ces personnes.

Signal important : les aidants estiment ne pas avoir la possibilité de refuser de venir en aide. Ils ne le disent pas explicitement, l'analyse met pourtant en évidence le fait que ceux-ci se sentent redevables vis-à-vis de la personne à aider. L'aide est alors le « juste retour des choses ».

Ce qui peut donc a priori passer pour un choix délibéré est en réalité une « décision contrainte et contraignante ». L'aide est vécue comme une obligation morale. Les aidants ne se situent donc pas dans une logique du choix où la raison guide la pensée mais dans une « logique » de l'affect.

Si, en apportant cette aide, les aidants répondent au sentiment du devoir accompli, ils éprouvent en retour de l'anxiété, de la révolte ou encore de la déprime. L'aide ne peut laisser place à un seul et unique sentiment. Les sentiments de révolte, de bonheur, de tristesse et d'anxiété n'apparaissent finalement pas comme des antonymes mais représentent la réalité psychologique des aidants. L'aide comme acte d'amour, comme source d'anxiété, comme obligation morale, etc. sont autant de représentations de l'aide qui reflètent la réalité complexe que vivent les aidants.

Les besoins prioritaires des aidants

45% d'aidants réclament un soutien. Les trois besoins prioritaires cités sont respectivement « quelqu'un pour me remplacer » (51%), « des informations sur des services d'associations de bénévoles » (42,5%) et enfin « des informations sur des services professionnels disponibles » (38%). Ensuite, près de 20% citent comme besoin « un lieu pour échanger, rencontrer des personnes qui vivent une situation similaire ». Ajoutons que les femmes sollicitent davantage que les hommes un soutien (49% des femmes contre 39% des hommes).

En réponse à leur fatigue physique et morale, à leur solitude… le besoin d'être remplacé (afin de retrouver du temps pour soi, de souffler, de partir une semaine, de s'occuper des petits-enfants…) est souvent répété en entretien. Si cette demande est récurrente chez les aidants, certains se sentent coincés par la personne aidée qui souhaite la présence et l'aide uniquement de son aidant proche et pas d'un autre.

Les aidants expriment leur besoin d'être correctement informés au sujet des services professionnels disponibles. Ils expriment l'idée d'une information centralisée car ils dépensent beaucoup d'énergie et de temps à trouver le bon interlocuteur et la bonne information. Outre le besoin de renseignements clairs et centralisés sur les services professionnels, ils mentionnent un manque de personnel dans ce secteur, un manque de formation et enfin, un accès encore trop onéreux à ces services pour certains aidants et aidés. Ainsi, les aidants réclament plus de personnel disponible, une bonne formation de celui-ci et enfin une diminution du coût de ces aides professionnelles.

Une autre manière d'aider les aidants dans leur tâche est de les soutenir moralement et donc de diminuer leur charge émotionnelle. Pour certains, un groupe de parole permettant de partager, d'évacuer le stress, de déculpabiliser apparaît comme la réponse à leurs difficultés psychologiques.

D'autres privilégieraient davantage l'écoute individuelle et professionnelle d'un psychologue ou psychiatre au groupe de parole. Une autre manière de répondre à cette charge morale serait également de reconnaître le rôle et les compétences des aidants. En effet, le manque de reconnaissance du travail des aidants par l'extérieur, tant par la famille que par le corps médical, est mal vécu par ces personnes.

Quelles perspectives d'aide aux aidants ?

La réalité des aidants recouvre une multitude de situations faite d'une grande hétérogénéité. Les appels à l'aide viennent de toutes parts : enfants malades, personnes dépendantes, accidentées, malades ou handicapées ou encore aux prises avec diverses assuétudes. Le vécu de l'aidant est également habité par une grande ambivalence de sentiments. Dans tous les cas on note une forte intensité du lien dans la relation même si au départ, la conscience de l'engagement est faible.

La difficulté survient en réalité quand l'aidant se retrouve comme seul interlocuteur face aux exigences de la personne aidée. D'où l'importance pour les aidants de pouvoir exprimer leurs attentes et leurs besoins, d'échanger leurs expériences, mais aussi de pouvoir trouver le répit au bon moment et donc la personne disposée à les remplacer, ou l'accueil temporaire de la personne aidée au sein d'un centre d'accueil de jour et/ou de court séjour.

Enfin, l'accessibilité financière des aides professionnelles représente un gros problème pour des ménages à faible revenu, n'ayant souvent d'autre solution que de faire appel à l'économie souterraine…


Source : www.senioractu.com

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